Les institutions fédérales et financières des États-Unis sont prêtes à tout pour surmonter la crise due au Covid-19. Mais à quel prix? Ce scénario va-t-il tourner au désastre, s’interroge Arnaud Leparmentier, correspondant du « Monde » à New York.
Les financiers sont des adultes qui rêvent d’embrasser la Belle au bois dormant pour la réveiller de cent ans de sommeil. Comme si rien ne s’était passé entre-temps et que le temps avait été suspendu. C’est ce que fait Wall Street, qui a décidé de surmonter la crise due au Covid-19 et vit déjà l’idylle du monde après. La Bourse parie sur un rebond rapide, en «V», qui permettra à l’économie de redémarrer, et pense que tout recommencera comme avant. Pour réaliser ce rêve, pendant le sommeil forcé de l’économie, les bonnes et les mauvaises fées sont activées. Pour que tout soit comme avant, en mieux.
La première fée s’appelle Silicon Valley. La crise provoquée par Covid-19 est le triomphe de l’Amérique de haute technologie sur l’Europe dans le tourisme. Le Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft) sortira renforcé de la crise, permettant à la planète de continuer à tourner au minimum pendant l’épidémie, tandis qu’un grand nombre de PME de haute technologie, comme la téléconférence Zoom, ont émergé. La crise est des dommages collatéraux – air, voiture, PME – mais, au fond, il accélère la bascule dans le monde virtuel du XXI du siècle.
La deuxième fée est le Congrès américain et l’administration Trump. Ne dites plus jamais que les États-Unis sont le pays du laissez-faire: Washington a décidé d’un plan de relance massif pour aider les citoyens et les entreprises. 660 milliards de dollars (609,40 millions d’euros) de prêts aux PME pour soutenir leurs salaires; 2 400 $ par mois en assurance-chômage fédérale supplémentaire; un chèque individuel de l’administration fiscale de 1 200 $.
Au total, la relance votée par le Congrès a atteint 3,5 billions de dollars, soit environ 15% du produit intérieur brut (PIB)! Un chiffre à comparer à la récession qui devrait avoisiner les 7%, contre une croissance attendue d’environ 2%. «L’État américain a réagi au choc. Il a supporté 150% du coût de la crise.